Pour beaucoup de ceux qui ont grandi avec Dorothée, la chanson qui revient systématiquement, comme un gimmick a un refrain simple, répétitif et enfantin : « et mes chaussettes, rouges et jaunes à petits pois ». D’où vient cette expression ??? Cela reste pour beaucoup un grand mystère ! Allusion à Dalida et son bikini ? Et pourquoi JLA (Le Croissant Masqué, le grand cerveau malade) a-t-il institué une chanson consacrée à la valise de Dorothée dans chacun de ses albums ? Et qui est ce mystérieux Sébastien dont Dorothée garde précieusement la photo ? Les chaussettes sont-elles rouges avec des pois jaunes ou l’inverse ? Tant de questions auxquelles nous n’avons pas de réponse ! Et pourtant, avec pas moins de 16 valises, on devrait trouver quelques éléments !

1982 : La valise

La toute première chanson consacrée à son fameux bagage parait naturellement sur le premier véritable album de Dorothée (si l’on exclut « Le Pays des chansons »), elle s’appelle tout simplement « La Valise ». A première vue, on peut penser à une chanson de remplissage (sans jeu de mot !). Les paroles ont peu d’intérêt, c’est juste une énumération sans logique réelle, sans histoire. La qualité de l’enregistrement est plutôt moyenne, la fin de la chanson étant parfois limite inaudible tant les effets sont superposés bizarrement. Cette chanson a néanmoins le privilège d’être la Face B du premier gros succès de Dorothée : « Hou La Menteuse ». Et la configuration d’un 45T fait qu’il était facile de les retourner et que les faces B pouvaient être de bons succès également. Ceux qui ont connu l’époque vous confirmeront que la chanson « La Valise » passait d’ailleurs souvent dans Récré A2.

Comme nous le disions, petite chanson marrante, sans grand intérêt : une jeune fille fait sa valise, on ne sait même pas où elle part. Elle énumère en vrac ce qu’elle a mis dedans, cela va des vêtements les plus classiques (une jupe grise, un foulard…) à des accessoires un peu plus loufoques comme une télé ou une perruque. Un certain Sébastien a l’immense privilège d’être en photo. Est-ce son frère ? Son petit ami ? Son chien ? Et chaque couplet se termine par la rengaine : des chaussettes rouges et jaunes à petits pois. Il est intéressant de constater que cette chanson a pu être utilisée dans les manuels scolaires de français à l’étranger, ce qui se comprend parfaitement tans le vocabulaire utilisé ici est varié. Elle n’est pas forcément pertinente mais a le mérite d’inaugurer une longue et passionnante série ! La chanson sera remixée en 2006.

1983 : J’ai vidé ma valise

Deuxième album, la Valise a l’immense privilège d’avoir une suite : après avoir rempli sa valise, voilà qu’elle la vide. La chanson intitulée « J’ai vidé ma valise » reprend quasiment les mêmes vêtements et pourrait être considérée comme une réponse à celle de l’année précédente. Sauf que nous avons quelques éléments narratifs en plus : non seulement nous savons que Dorothée est en vacances à la plage, et surtout, nous voyons ici apparaître pour la première fois celui qui deviendra une arlésienne, une métaphore filée, un incontournable : LE GARCON ! Il aide gentiment Dorothée à porter sa valise, quelle galanterie ! La chanson sort en face B du 45T porteur de l’album (« Pour faire une chanson ») mais passe plutôt inaperçue.

1984 : Où est passée ma valise ?

On aurait pu penser qu’après avoir rempli et vidé la valise, la boucle était bouclée : que nenni ! On peut désormais s’imaginer que la routine est installée, que l’habitude est prise : chaque disque de Dorothée contiendra forcément et nécessairement une chanson consacrée à la valise ! En 1984, pour le troisième album, Dorothée remet le couvert : cette fois elle a perdu sa valise (scénario qui se reproduira plusieurs fois !) ! Dans cette chanson « Où est passée ma valise? », le scénario prend de plus en plus d’importance, même si on continue d’énumérer et de lister. Dorothée se lamente, regrette d’avoir cédé à la gourmandise. Et curieusement, « le garçon » rencontré l’année dernière a disparu. La chanson se termine sur une énigme, même pas une note d’espoir… peut-être une façon de laisser la porte ouverte à une nouvelle version qui apporterait la clé de cette énigme ?

1985 : J’ai retrouvé ma valise

La solution nous est livrée l’année suivante, en 1985, avec l’album « Allo Allo » qui contient une 4ème version de la valise, réponse directe et évidente : « J’ai retrouvé ma valise ». Pour la première fois, une chanson-valise s’offre une couleur musicale assez marquée, ici c’est une version créole, du soleil, et pour cause : la valise était en fait dans les îles Marquises ! L’important est de l’avoir retrouvée, on ne sait pas qui lui avait piqué, on ne sait toujours pas ce qu’il est advenu du charmant jeune homme rencontré deux ans auparavant ! La chanson se termine sur une confusion des choristes qui ne savent plus sur quelle mélodie chanter le refrain (allusion rétrospective aux valises précédentes ?), Dorothée est heureusement là pour rétablir la vérité !

Pendant les quatre premières années, les chansons-valises fonctionnaient par paires, questions-réponses, Dorothée remplit sa valise, puis elle la vide, ensuite elle la perd, puis la retrouve.

1986 : Ma valise

Album « Maman », autre très gros succès de Dorothée, et autre Valise en face B du 45T phare de l’album. Cette fois-ci, c’est « Ma Valise » (donc à ne pas confondre avec le premier titre !). Chanson assez narrative dans laquelle elle a une bonne raison de faire une description : elle se fait contrôler par un douanier (qui finit par l’inviter à dîner) et les choristes répètent pour être sûres d’avoir bien compris ! Cette valise a tous les ingrédients : un contenu loufoque, un garçon (donc le douanier) et comme l’an passé, la chanson se termine par un gros délire entre Dorothée et ses choristes qui ne savent plus sur quel air chanter ! La toute fin de la chanson est plutôt incompréhensible !

1987 : Valise-valise

On a déjà utilisé LA valise, Ma valise… on va donc se contenter de doubler le nom, cette année c’est « Valise-valise » ! Beaucoup considèrent cet album transitoire comme bâclé. La chanson qui nous intéresse s’inscrit parfaitement dans la continuité instrumentale du reste de l’album : synthés à fond ! On repart sur une ancienne idée : la valise qui a disparu. Dorothée décrit ici toutes ses investigations, son investissement pour la retrouver. Elle va même jusqu’à trouver la Police. Heureusement, le commissaire est charmant ! (Nous avons donc bien « le garçon » ! Ouf ! l’honneur est sauf !). La valise doit vraiment être énorme puisque Dorothée parvient même à y rentrer ses meubles ! Cependant, cette année, l’histoire se termine bien, c’était Tante Simone qui avait piqué la valise ! Re-Ouf ! Dorothée peut la ranger jusqu’à l’année prochaine.

1988 : Qu’est-ce que j’oublie dans ma valise ?

C’est les vacances, et au moment de partir, Dorothée décide évidemment de faire sa valise. Et là, malheur : elle a oublié un truc… mais QUOI ??? Elle vide, revide et finit par se souvenir : ses chaussettes ! Cette valise dénote un peu des autres, les couplets se concentrent davantage sur l’histoire de la chanson, un peu moins sur la description du contenu. Encore quelques objets farfelus comme un os de requin, une poire… Le couplet tant attendu se fait désirer et n’arrive qu’à la fin (si on exclut le pont musical en mode teaser !). La chanson est en face B du 45T « La machine avalée » et surtout, est chantée sur scène (au Zénith) : grande première pour une valise ! Par contre, pas de garçon dans la chanson cette année !

1989 : Ma nouvelle valise

Nous avions eu droit à une version créole il y a quelques années, nous avons cette fois ci une version twist avec une intro un peu blues dans laquelle Dorothée nous lâche un gros « Oh yeeeaaaahhhh » qui semble remonter du plus profond de ses tripes! Le titre est assez dynamique et continue d’exploiter les différentes perspectives du thème : cette fois, c’est « Ma nouvelle valise ». Petite allusion au passé : Dorothée a la même valise depuis des années… Heureusement que Maman est là pour en acheter une nouvelle ! Et c’est d’ailleurs l’occasion de nous dire ce qu’il y a dedans. Le garçon est de retour, d’ailleurs on a un peu l’impression qu’il l’attendait sur le quai de la gare « ça n’a pas manqué… ! » nous dit-elle ! La chanson sera interprétée lors des spectacles à Bercy en janvier 90.

1990 : Valise ninety-one

Après le zouk, le twist, Dorothée se lâche complètement cette année et nous offre une valise version… rap ! Pas réellement d’histoire dans la chanson, une description du contenu ponctuée de « est-ce que c’est tout ? mais non ! », et un « garçon » qui tombe comme un cheveu sur la soupe à la fin de la chanson. Et on apprend que Dorothée a une cousine Lise qui a tendance à lui piquer ses mecs (peut-être la fille de la tante Simone la voleuse de valises ?). Visiblement, l’équipe de Dorothée a participé aux chœurs de la chanson : Ariane, Jacky et même Monsieur JLA qui s’octroie l’honneur de prononcer le dernier mot de la chanson ! Le titre sortira en single et sera régulièrement interprété les mercredis après-midi dans l’émission (même en duo avec les Benny B !).

Dorothée nous montre à quel point elle est à la mode : non seulement elle fait du rap, elle arbore des tenues ultra flashy dans le « clip » et surtout, le titre est en anglish ! La « valise ninety one » sera la première dont le titre contiendra l’année, d’autres suivront ! Pour la troisième année de suite, la chanson est interprétée sur scène, lors de la tournée 91.

1991 : Ma valise pour danser

On peut faire plein de choses avec une valise… mais alors danser avec, j’avoue que je n’y avais jamais pensé. Et pourtant, Dorothée l’a fait. Le « garçon » est implicitement présent dans la chanson car c’est à lui qu’elle est adressée (oh bébé !). C’est certainement la chanson de Dorothée où elle prend sa voix la plus… érotique ! Dorothée se croit en boite si l’on en croit le clip et incite à taper des mains ! Je ne savais qu’on avait besoin d’une laisse et d’un collier de chien pour aller danser ! Avait-elle au moins demandé l’autorisation à Roxan avant de lui emprunter ?

1992 : Valise 93

Cette chanson sert d’introduction et donne le ton pour la comédie musicale « Le cadeau de la rentrée », proposée en septembre sur TF1 : non seulement la valise parle mais ensuite elle est capricieuse et refuse de rentrer de vacances. Schéma classique : histoire, description et refrain (les chaussettes !). Pas de garçon cette année ! Face B du single « Une histoire d’amour ».

1993 : Valise Ragamuffin

On continue de décliner les valises selon tous les styles musicaux, avec cette année du reggae. Le titre est assez sympa, quelques calembours, beaucoup de second degré, quelques messages moralisateurs (cherchez le rapport avec le contenu d’une valise ?). Dorothée joue à fond la carte de l’autodérision dans le clip ! Cette année, les chaussettes sont aussi « jolies » et « petites » ! Pas de garçon mais le message est universel, Dorothée s’adresse à ses frères (et aussi à ses sœurs mais qui sont aussi ses frères). Pas de réelle présence scénique cette année mais le refrain « standard » sera néanmoins repris dans le medley des tubes à Bercy.

1994 : Ma valise pour Nashville

Cette chanson aux rythmes Country-western s’inscrit parfaitement dans le concept de l’album « Nashville Tenessee ». On reprend un thème déjà exploité : la disparition ! Cette fois-ci, Dorothée est confrontée à la pire hantise de tous les voyageurs : un bagage en souffrance. Cette chanson est certainement celle qui regroupe toutes les caractéristiques du genre : un schéma histoire-énumération-refrain classique, un pont, une allusion au passé (depuis plus de 10 ans !) et surtout, un garçon ! Il arrive tout à la fin, tel un prince charmant pour rapporter le précieux bagage de Dorothée. Cerise sur le gâteau, il est mignon et l’invite à dîner !

1995 : Valise 96

Titre banal pour une chanson… originale. Cette fois-ci, Dorothée est une vraie rappeuse avec sa casquette à l’envers. Elle devient presque vulgaire et va jusqu’à traiter de « sale délinquant » un petit rigolo qui a osé lui « chourrer » son graal ! Le gimmick « tell me baby » sera repris pour être l’indicatif de l’émission. Chanson interprétée au Zénith en 96 avec les MN8 ou avec Babsie, Isabelle Bouysse et les jumelles.

1996 : Valisa 97

Dernière Valise avant un long repos. Après avoir dansé le rap, le reggae ou le twist, nous dansons cette année La Macaréna ! L’intérêt de la chanson repose dans la rime unique en A. On retombe dans la tendance des débuts : une pure description d’objets, si l’on excepte le pont. Plusieurs fans observateurs ont vu un symbole à la fin de la chanson : Dorothée ferme la valise avec un cadenas, elle devait bien se douter qu’elle n’allait pas la rouvrir avant un certain temps… A noter qu’un medley des valises sera proposé lors de la dernière émission du Club Dorothée fin août 97.

2010 : Valise 2010

Le retour de Dorothée avec ce nouvel album était à la fois inattendu et inespéré. Mais un album sans valise aurait été tout simplement inconcevable ! Cette année, le titre conclut l’album. Il est intéressant de noter que c’est la chanson la plus longue du répertoire de Dorothée ! JLA (aka Grand Cerveau Malade) se devait de nous pondre une merveille d’originalité et d’humour. Le résultat est relativement à la hauteur avec cette version slam. Dorothée joue à nouveau à fond la carte de l’auto-dérision et de l’ironie. La valise a à nouveau disparu, Dorothée se résout donc à aller consulter un marabout (c’est bon, on a le garçon). La chanson est avant tout une narration parlée, ponctuée de chaussettes, l’énumération (la même qu’en 82) n’arrive en bloc que vers la fin. Petit clin d’œil aux années fastes : les choristes sont à nouveau déchaînées et ne veulent pas terminer la chanson ! Le titre sera interprété à l’Olympia, à Bercy et sera intégré au maxi 45T collector édité à l’occasion des concerts.

Non seulement je n’ai pas répondu à mes premières questions, mais en plus, d’autres ont émergé : Quelles sont les dimensions de sa valise pour contenir autant de bazar ? Dorothée a-t-elle payé des excédents ? Si oui, combien ? Avait-elle un programme de fidélité ? Est-ce que les poires, jambonneaux ou bout de pains ne se sont pas écrasés et n’ont pas empesté la valise ? Comment pouvait-elle emporter des appareils électroniques alors qu’elle n’a pas d’adaptateur ? N’a-t-elle pas eu d’objets confisqués à la sécurité ? Avait-elle une assurance bagages ?

Si Dorothée avait sa valise dans chaque album, les Musclés avaient quant à eux systématiquement une chanson sur le Père Noël !

La valise faisait partie des rituels associés aux albums de Dorothée, et c’est le seul auquel elle n’a jamais dérogé pendant 16 albums ! Les autres « rituels » comme une chanson sur le rock ou une chanson de Michel Jourdan ont souffert d’au moins une exception.

Je crois que la meilleure conclusion sera donnée par Dorothée elle-même lors de sa dernière émission sur TF1 : « Je remercie les auteurs et compositeurs d’avoir mis autant de choses dans ma valise, ce n’est pas facile à dire Les chaussettes rouges et jaunes à petits pois, et je déteste les valises ! »

Merci à Pierre pour ce superbe article qui nous aura bien fait voyager.

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